Le petit déjeuner du motel est encore pire que le précédent. Je ne suis pas difficile avec les choses sucrées mais des donuts avec autant de glaçage que de pâte, laquelle est fourrée à la crème... Difficile. 
Nous prenons la route pour Warren, lieu de notre wwoofing chez Oyster River Winegrowers. Sur la route, les paysages commencent enfin à ressembler à l'Amérique profonde : moins de maisons, des villes vraiment espacées, et davantage de pick-ups.
On décide de s'arrêter à Five Islands manger du homard car nous arrivons au cœur de la région où c'est la spécialité. Le resto est fermé mais la côte est magnifique, faite de petites îles peuplées de sapins. Des bateaux de pêche et des casiers à homards sont éparpillés un peu partout, enrichissant encore le paysage.
L'idée de manger du homard ne nous a pas quitté pour autant. Nous trouvons un autre resto spécialisé. 1 homard pour Madame et 2 homards pour Monsieur. Le tout avec le bavoir adapté. Un délice !
Arrivés à destination, le mercure est bien bas lorsque nous rencontrons la famille au complet : Brian et Allie, leurs enfants Sol et Sadie, Peggy le chat et Regie le chien... Qu'est ce que c'est que ce chien ? Une saucisse assez poilue à tête de renard, avec des pattes de 15 cm. Camille m'explique que c'est la même race que le chien de la reine d'Angleterre. Pas très fermier en apparence.
Nous découvrons la grange où nous allons dormir. Malgré les rénovations clairement effectuées sur la structure, c'est pas top : 2 matelas miteux à même le bois, pas de chauffage, des couvertures qui traînent par terre et pas d'oreillers. On anticipe un peu la nuit à venir et effectivement, le froid nous réveille plusieurs fois.

Mal reposée au petit matin, Camille confonds le chat qui monte sur le lit avec une souris. Nous nous mettons d'accord pour rester au moins 2, 3 jours pour voir comment se passent les journées de travail et les nuits, car pour le moment, l'enthousiasme nous manque. 
Brian nous propose, entre autres, du pâté pour le petit déjeuner... Je reste souple mais Camille apprécie.
Nous faisons le tour de la propriété, rencontrons les chevaux de traie, Fred et Don, qui servent de tracteurs pour les vignes, et la vache Raya qui sert de tondeuse et occasionnellement pour le lait. 
La première journée est faite de désherbage et d'élagage, physique et moyennement interressant. Les animaux devant être déplacés 2 à 3 fois par jour, nous établissons aussi des pâturages mobiles.
Nous terminons vers 17h et mangeons à... 18h ! Cependant, Brian nous fera déguster tous les soirs du vin ou du cidre de sa cave. 

Peggy vient nous réveiller après une bien meilleure nuit. Nous déplaçons les animaux et jardinons avec Allie qui adore parler politique (PS : Famille démocrate). J'enlève quelques tiques sur Don et pars m'acheter un pantalon "à pourrir" pour nos travaux.
Entre deux sessions d'étiquetage de bouteilles de vin (588 au total), je profite de l'absence de Brian pour vendre une bouteille de cidre à des texans en tourisme dans l'état.
Les dîners sont très bons, variés et souvent à partir de produits de la ferme. Nous retrouvons l'enthousiasme pour rester.

Day off ! Et je ne trouve rien de mieux que de me bloquer le dos en allant à la laverie...  Malgré tout, nous cuisinons un dîner français pour toute la famille avec leurs produits : œufs mimosas des poules locales, bœuf bourguignon avec feu leur ancienne vache, et tarte tatin.
Pour accompagner, Brian ramène 2 bouteilles de vin : "French red wine for tonight !" dit-il. J'y jète un coup d'œil... 1 Corbière et 1 Minervois. Dans le mille, Brian !

Après avoir acheté du sucre pour le cidre et découvert la première VRAIE boulangerie depuis notre arrivée aux USA, tenue par des amis d'Allie, nous commençons l'embouteillage de 1668 bouteilles de cidre, ce qui nous prendra la journée. Arrivés au bout, mon dos ne me laisse toujours pas tranquille. Pas de décontractant musculaire sans prescription dans ce pays, je demande à ma mère de m'en envoyer de France à notre prochaine adresse en Gaspésie. 
Le soir, le Clam Chowder (soupe aux pétoncles typique de la Nouvelle Angleterre) me réconforte grandement.

Day off #2. Peggy s'est fait renverser par une voiture dans la nuit, la famille est sous le choc devant l'animal entre la vie et la mort. Ils décident de l'emmener dans une clinique vétérinaire malgré l'hésitation sur les frais que cela peut engendrer.
Nous conduisons dans les environs de Rockland pour sortir un peu de la ferme, et manger du homard à nouveau, en roll cette fois-ci. À notre retour, Allie ramène Peggy vivante mais K.O. Je m'en occupe un peu, surtout pour l'hydrater car elle ne fait que dormir.

Nous terminons notre sejour avec du jardinage, de l'étiquetage, un peu de logistique et un bon BBQ américain chez Martha (la propriétaire de la boulangerie de Rockland), tôt certes, mais génial pour son côté social, avec feu de camp entre forêt et rivière. Je remarque à ce moment-là, l'étendue des possibilités qu'ont les américains pour choisir un endroit où s'implanter, due, bien sûr, à la taille du pays. Il suffit juste d'être un peu moins difficile sur les standards de confort que nous avons en Europe.

Nous partons aujourd'hui pour Acadia National Park après le câlin d'adieu américain typique. La journée n'étant pas radieuse, nous allons nous poser directement au campement, flânons puis finissons par un petit feu de camp pour faire griller du bacon et des asperges.

On commence par visiter l'intérieur des terres. C'est beau et préservé, fait de lacs et de hautes collines arrondies et recouvertes de sapins. Jordan Pond, petite rando vers Bubble Pond et escalade (le mot est bien choisi !) de la face ouest du Mont Cadillac, point culminant du Park. La journée a passé vite et nous sommes maintenant très loin de notre point de départ. Je discute avec un couple de retraités pour qu'ils nous redescendent en voiture et ainsi s'économiser des heures de marche et éviter de rentrer de nuit.
Le soir, Camille prépare sur le feu des courgettes fourrées au fromage, et c'est vraiment bienvenu !

Aujourd'hui, nous longeons la côte Est du Park, de Bar Harbor à Seal Harbor. Je voulais faire une via ferrata, mais le secteur est fermé à cause de la reproduction des faucons. Nous nous retranchons sur une balade autour de Great Head et Sand Beach, qui nous montre des paysages peu communs pour nous. Des collines et falaises se jettent dans l'océan, toutes recouvertes de sapins. Peu commun, car je n'avais jamais vu des sapins ailleurs qu'à la montagne, et l'association des ces arbres avec le littoral est un vrai dépaysement.
Nous dînons à 18h15 (ça devient une habitude !) pour aller voir le coucher de soleil au sommet du Mont Cadillac. C'est populaire mais pas fou, nous sommes un peu déçus et rentrons nous coucher tôt.
Et pour cause, demain, nous nous levons à 6h pour lever le camp et partir pour 7 à 8 heures de route vers la Gaspésie. Une sorte de journée-test pour la future traversée du Canada.