Nous partons pour Percé sous la pluie, avec une escale à Saint-Siméon pour passer faire un coucou à André, mais avant cela, nous récupérons par chance, mes médicaments pour le dos envoyés par ma mère au bureau de poste de Maria ; ils venaient d'arriver.
11h, nous arrivons chez André, qui nous attends avec des patates et des truites pêchées la veille. Bonne entame. Discussions autour de la pêche se poursuivant, il nous propose d'aller en faire dans le ruisseau derrière chez lui. Il fait un temps de merde, inutile de se presser, on reste un peu.
Le ruisseau en question est boueux et assez haut, à cause des pluies actuelles. Pas de pêche, mais des chevreuils pour compagnie. André nous embarque alors chercher du Ricard et des bières pour s'en remettre, et décidons de faire un tour de pick-up on-ne-sait-où, à travers les chemins forestiers, le matériel de pêche toujours avec nous.
En chemin, on s'arrête chez un ami d'André (il connaît tout le monde !) pour une histoire d'emprunt d'outil. Arrive alors un autre ami dans son "6 roues" (Quad modèle XL), avec un ours fraîchement tué, posé dessus. Mon premier ours, et il est victime de braconnage... Je suis intrigué par la bête, son poil, ses griffes, ses babines. Il pleut encore. Cela rend la scène difficile, laissant la tristesse et le malaise s'afficher sur nos visages avec Camille.
Nous reprenons la route, prenons un premier chemin forestier quand André, affolé de la quantité, insuffisante selon lui, de bières emmenées, fait demi tour pour en acheter davantage. On ne sait pas trop où on va, mais on y va.
On s'arrête au bord d'un premier lac, après des chemins faisant office de "car wash" naturel grâce aux flaques et branches d'arbres en travers. On prépare les cannes à pêche, André prends une vingtaine de secondes pour faire 2 ou 3 lancers... "On s'en va, il y a rien ici !" dit-il. La pêche doit être drôlement efficace dans la région pour abandonner un spot aussi rapidement. Cependant, l'homme connaît son territoire, et nous partons vers un autre lac, moi au volant cette fois-ci.
À destination, André m'emmène lancer la ligne, debout sur barrage de castor. Ça mord, et j'attrape ma première truite, et une seconde juste derrière. Je suis le plus heureux ! Au bout de 15 min, on change encore de spot, pour un tout petit ruisseau.
On commence à avoir bien froid, avec le vent glacial et la pluie fine continue. Du coup, je nous trouve ridicules avec nos vêtements techniques Goretex, merinos, et tout le bordel, alors qu'André, avec sa chemise et une vieille polaire qui vit sous le siège du pick-up, se porte comme un jeune homme.
André sort sa canne à pêche à la mouche. J'observe le lancer avec fascination. Stop la pêche, nous avons 9 truites.
Il est 16h30, et on est loin d'être parti. On fait une halte chez la maman d'André, qui, du haut de ses 87 ans (elle en fait bien moins), nous accueille avec des gâteaux au chocolat bien tissous ! On rentre par d'autres chemins, à travers les champs de bleuets.
Arrivés chez lui, André me montre un truc assez dégueu pendant qu'il vide les truites dans l'évier : une d'entre elles est toujours vivante, il lui coupe la tête avec un sécateur, le corps continue de bouger pendant une minute... Il nous offre le dîner, 2 pots de confiture maison, et toutes les truites ! En effet, Monsieur n'aime pas le poisson, il les pêche pour le plaisir et les donne à des amis, famille, et personnes âgées. Je suis vraiment touché par tant de générosité et me réjoui de voir que des personnes comme lui existent encore.
Nous partons vers 19h30, sans en avoir envie, mais notre coachsurfing à Percé nous attends depuis 18h. C'est parti pour 2h de route de nuit sous la pluie.

Je pense souvent à André, ces bons souvenirs mais aussi du souci pour un homme d'un certain âge, seul et alcoolique, sans travail, dont la maison a sérieusement besoin de travaux, mais qui a tant à offrir et dont la compagnie est précieuse.