1er jour de traversée - 650 km : On a chaud entre vallons, sapins et lacs. Les Laurentides sont plaisantes malgré le sale état des routes qui se frôlent un chemin à travers les milliers de petits lacs qui couvrent le nord du Québec. Je suis crevé, je fais tomber la moitié du Tupperware préparé par Camille lors du déjeuner.
Nous arrivons en fin de journée vers Val d'or et Rouyn-Noranda, une région où des gens habitent uniquement pour le travail que d'immenses mines d'or procure.
S'apprêtant à passer notre première nuit dans la voiture, nous trouvons un endroit plus ou moins tranquille, au bord d'un lac. La route sert à la fois d'énorme passage-piéton et de cimetière aux chenilles, les moustiques nous chargent littéralement à la tombée du jour, et décidément, je fais tomber la quiche de Camille au sol.
L'aménagement, totalement improvisé, de la voiture se fait bien et nous passons une nuit acceptable.

2ème jour - 950 km : Une douche dans le lac devant le bus scolaire qui passe et nous prenons la route à 8h30 vers l'Ontario. Peu après la frontière entre les 2 provinces, on devine une nouvelle gestion forestière plutôt archaïque : on coupe et on replante pas.
Le petit dej ayant été frugal, un McDo au milieu de rien fait son apparition pour notre plus grand bonheur. Les averses puissantes rythment notre route vers le Sleeping Giant Provincial Park. Arrivés au camping du parc, 2 chevreuils nous rendent visite nonchalamment, mais les insectes, moustiques compris, attaquent vite et nous envoient sous la tente.

3ème jour - Repos : Nuit froide, quand pourrons-nous faire une vraie bonne nuit en campant ? Nous sommes au bord du Lac Supérieur, et passerons la journée ici. Les chalets et pontons qui bordent le lac rendent le paysage reposant.
Un pique-nique sur une plage de galets avec un chevreuil, quelques km en VTT plutôt musclés, des millions de moustiques partout et tout le temps, le risque de croiser des ours, l'ascension du mont principal du parc bien raide, menant à un panorama du Lac Supérieur. Ce lac est une mer, des cargos y naviguent même.
Retour au camping, toujours avec moustiques et chevreuils. Le linge sèche sur notre corde de 20 mètres pendant que nous nous mettons au lit, dans la voiture cette fois-ci, le froid de la nuit passée nous ayant ravisé sur la tente.

4ème jour - 770 km : Malgré les dizaines de moustiques écrasés et les efforts considérables pour cacher le moindre centimètre carré de peau, Camille découvre avec dépit les piqûres qui la recouvrent. Le linge n'a absolument pas séché.
À Thunder Bay, la ville voisine, nous nous procurons un anti-moustiques bien chimique (le naturel a prouvé qu'il était absolument inefficace), une couverture en laine pour compenser nos faibles duvets dans les Rocheuses, et une salopette à l'armée du Salut parce qu'elle est trop belle. Un Couchsurfing réservé pour ce soir, un car wash et on repart pour Winnipeg dans le Manitoba. Un Subway ! Et un fast-food différent de plus à notre compteur.
L'Ontario n'en fini pas de finir, à travers réserves indiennes et mini lacs. Cependant, la frontière avec le Manitoba est plus que visible. En quelques km, nous passons des forêts recouvrant un paysage très vallonné, à des plaines infinies, une mer verte de monocultures, séparées par des routes en lignes droites, tracées à la règle.
Jo-Ann nous accueille le soir dans sa maison en bordel, cause emménagement récent. Circulent alors dans la salon, enfants, bébés, amis, petit ami, ex et femme d'ex et j'en passe, au milieu des cartons, d'une énorme TV, de 2 tortues cherchant désespérément à s'échapper de leur aquarium à l'eau verte, et des "Jiiiiiz" (pour "Jesus") exclamés lorsque le ton monte un peu. On est dans "Shameless" !

5ème jour - 790 km : Manitoba, Saskatchewan... Pourquoi avoir séparé ces 2 provinces, chacune grande comme plusieurs pays d'Europe, qui semblent tellement identiques ? J'ai l'impression qu'on pourrait nourrir la planète avec les champs que l'on traverse ; et encore, nous voyons uniquement de part et d'autre de notre route. Des silos géants font office de reliefs, sous lesquels le rail relie les fermes, remplissant les cuves des wagons. Les exploitations sont immenses mais nous ne voyons ni habitation, ni de gens travailler dans les champs.
Nous prévoyons le repas pour nos hôtes Couchsurfing de ce soir, à Saskatoon, chez Tyrell et sa copine. Bière avec Clamato, diner, high-five avec le chat, vin de Colombie Britannique et Porto. On se porte bien ! Nous en apprenons plus sur ce que nous avons vu dans la journée : les exploitants louent ou possèdent des camions-tracteurs à 1 million de $, à cabine climatisée, auto-guidé par GPS, ainsi le boulot se fait tout seul, à n'importe quel moment de l'année (il fait jusqu'à -50°C l'hiver, et jusqu'à 30°C l'été).

6ème jour - 530 km : Sans se presser, nous partons pour l'Alberta. Sans déconner, ça sent le pétrole à l'entrée de la province ! Hop, un Pizza Hut ! +1.
Rien de bien intéressant sur la route, j'en ai marre de rouler, et encore plus dans le néant. Nous arrivons à Edmonton, chez Karl. On part en ville, dans son Pathfinder rouillé, boire des bières avec des amis (déjà saouls à notre arrivée) dans un bar branché mais agréable. Une dernière binouze dans un autre bar, calme avec un concert rock, et nous rentrons, sans avoir dîné. 

7ème jour - 330 km : Karl travaille dans la construction et gagne peu, comme beaucoup de gens en ce moment, qui ont du retrouver un travail après être sortis de l'industrie pétrolière locale en pleine crise.
Nous quittons cette ville de 1 million d'habitants, à l'allure triste et au destin peu réjouissant, sous la pluie qui nous mène aux reliefs, qui nous mènent aux Rocheuses !
Nous y sommes.